ROSEDALE, le jeune groupe français de Blues-Rock, était présent fin août au Climax Club Legend de Riotord, près de St Etienne, salle qui ne cessera de nous étonner par l’atmosphère qui s’en dégage et la qualité de sa programmation.
Nous avions chroniqué l’album « Long Way To Go » dès sa sortie. Nous avions immédiatement perçu le côté remarquable de cette formation, conduite par Amandyn Roses et Charlie Fabert. Le concert du Climax a été au delà de nos espérances ! La chanteuse, le guitariste et l’ensemble des musiciens sont réellement excellents en Live ! Plusieurs titres de l’album ont naturellement été joués, mais également quelques standards du Rock, sans oublier des morceaux de Beth Hart et de Joe Bonamassa. Cela a permis de mettre en exergue les qualités d’Amandyn Roses, la chanteuse, et de Charlie Fabert, remarquable guitariste au jeu subtil, délié et hautement créatif, ainsi que l’homogénéité et la complicité évidente de l’ensemble des 5 musiciens.
Après le concert, Amandyn et Charlie se sont rendus disponibles avec beaucoup de gentillesse pour répondre à quelques questions. Les échanges que nous avons eu ont mis en évidence la volonté et la détermination de ces 2 jeunes musiciens, dotés d’une forte personnalité et totalement impliqués dans leur projet. Le second album de ROSEDALE sortira le 9 novembre 2018. Nous concernant, il est évident que ce groupe a une longue vie devant lui.
Pouvez-vous nous raconter l’histoire et l’origine du groupe ? Comment vos parcours musicaux respectifs se sont-ils rencontrés ? ROSEDALE est-il actuellement un groupe stable ou plutôt l’union de 2 artistes ?
Amandyn ROSES : j’ai rencontré pour la première fois Charlie FABERT à l’occasion de sa venue avec un groupe à un Master Class à Nancy en 2013. J’ai eu un coup de cœur direct et émotionnel qui allait au-delà du jeu. Je lui ai envoyé un message après le concert pour lui dire que j’en avais pris plein les oreilles et plein les yeux. Nous sommes ensuite restés en contact, tout en s’étant dit qu’il serait génial d’avoir l’occasion de jouer ensemble. L’occasion s’est présentée lors d’un festival en Alsace le 10 juin 2016, où on s’est arrangé pour que ce soit filmé. 2 vidéos ont été diffusées sur internet avec un effet boule de neige, de plus avec une dizaine de retours de programmateurs. Tout est parti de là, et tout s’est ensuite enchaîné très vite.
Philippe Sissler, l’actuel bassiste, était présent pour ce premier concert. Une seule répétition a eu lieu avec le groupe provisoire avant ce concert. 10 festivals ont été signés en 3 semaines, et la décision de faire un EP a été prise dans la foulée. Il a été enregistré en juillet pour une sortie en octobre 2016. Nous avons ensuite été contactés très rapidement par notre label actuel DixieFrog, l’un des plus grands labels de blues en Europe, pour la réalisation d’un album avec une sortie programmée pour mai 2017. Nous avions carte blanche, et leur confiance. Cet album est également sorti au Japon, qui était intéressé. La release party s’est déroulée à Paris au New Morning alors que le groupe avait un peu moins d’un an d’existence !
Comment le nom du groupe a-t-il été trouvé ?
Nous cherchions un nom qui puisse jouer avec ROSES, celui d’Amandyn. Ce nom, ROSEDALE, une ville du Mississipi, a été inspiré par une chanson de Robert Johnson qui dit dans la légende qu’il y aurait vendu son âme au diable contre la gloire. Robert Johnson a eu une influence énorme dans le blues. Clapton avec CREAM a repris le titre Cross Road Blues, avec un ajout qui parle de Rosedale. Nous nous sommes dit que c’était également un bel hommage à nos influences Blues-Rock.
ROSEDALE est-il actuellement un groupe stable, ou plutôt l’union de deux artistes ?
Les 2 ! En fait c’est nous deux qui « drivons » le projet, parce que nous l’avons créé ensemble. Dans n’importe quel groupe existant il faut des « leaders », pour prendre les décisions, choisir les directions, s’occuper du business qui va derrière le groupe… Pour nous, ROSEDALE représente le projet de notre vie, pour lequel nous nous consacrons à fond. C’est en fait une histoire d’amour qui s’étend avec le groupe. Les musiciens sont de vrais amis, auxquels on tient humainement, et ils nous soutiennent. Si à la base, notre idée était d’avoir des musiciens qui jouent bien, nous avons eu la chance de ne pas nous contenter seulement de ça, et d’avoir en plus des personnes stables, fantastiques, qui s’investissent et apportent des idées.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Charlie : Denis Palatin est un batteur très connu du milieu Blues. On a joué à temps plein ensemble pendant 5 ans dans un autre groupe, entre autres. J’avais 17 ans quand j’ai fait mon premier concert avec lui. Quand est arrivé ROSEDALE, il fallait un batteur qui « tue », et, avec Amandyn, on a tout de suite pensé à lui. Depuis juillet, le groupe a un nouveau clavier, Séraphin Palméri, qui était une connaissance de Denis. A la base, on avait simplement besoin d’un remplaçant, mais il a tellement bien fait le travail, et on s’est tellement bien entendus humainement qu’on s’est dit « la place est à lui ». C’est le nouvel adopté de la famille. Séraphin n’a pas participé à l’enregistrement du second album, car il n’était pas encore arrivé. Le claviériste qui a participé à l’enregistrement est une surprise… et il est « monstrueux » !
L’idée de faire un disque vous a-t-elle semblée être une évidence ?
Le disque nous a été commandé, mais on voulait aussi le faire. On ne s’était pas imaginé que ça irait aussi vite ! En plus, avoir un label comme DixieFrog au bout de 6 mois, c’est un luxe, comme faire le premier concert à Paris, au New Morning !
D’où viennent vos choix musicaux, très orientés Blues ? Quelles sont vos sources d’inspiration respectives et communes ?
Amandyn : j’étais plutôt dans le côté rock, à l’écoute, pendant des années. Après je suis tombée sur des artistes qui m’ont touchée, comme Janis Joplin et Aretha Franklin, que je ne reprenais pas, mais que j’appréciais à écouter en tant que chanteuse. J’ai ensuite découvert Beth Hart, et wahou !… Tout vient beaucoup de là, et de tous ces artistes. Après c’est parti avec Charlie, et il y a eu un mélange des influences. Il y avait également des influences communes, Led Zeppelin, AC/DC, et le mix s’est fait naturellement.
Charlie : j’ai décidé de devenir guitariste quand j’avais 13 ans, après avoir écouté « Stairway to Heaven ». La guitare et la musique n’était pas quelque chose que j’avais en tête, mais l’écoute de ce morceau a été pour moi une révélation ultime, et l’évènement déclencheur. Je me suis ensuite débrouillé tout seul pour réussir à acheter une guitare. J’ai appris à jouer de cet instrument en autodidacte, sans jamais avoir eu de professeur. J’ai emprunté à la bibliothèque municipale de ma ville un livre d’accords de guitare et j’ai voulu savoir improviser en cherchant les notes qui sonnaient juste, et sans connaitre les gammes. C’est comme cela que j’ai développé mon jeu. J’ai tourné très tôt, car c’est devenu mon métier à partir de l’âge de 17 ans, avec beaucoup d’artistes différents et dans plein de genres de musique. Le reste de mon apprentissage s’est fait sur « le tas ». Mes plus grandes influences sont à la base Led Zeppelin, Jimi Hendrix, Deep Purple, Steve Rai Vaughan et tout ce qui est Rock des années 70’.
Vous attendiez-vous à une telle audience pour votre premier disque ?
Amandyn : on l’espérait évidement, mais personnellement je suis tous les jours heureuse et en même temps surprise de voir tout ça ! C’est une vraie récompense par rapport au travail que cela demande, et par rapport à la passion qu’on a pour la musique.
Charlie : d’une manière générale, j’ai eu la chance de jouer avec pas mal d’artistes. Je n’ai jamais vu un intérêt aussi fort de la part du public et des programmateurs pour un groupe aussi jeune, avec une audience qui a grandi en si peu de temps. C’est toujours une surprise. Même si c’est quelque chose qu’on trouve mérité, car on travaille 24/24, ça n’est jamais quelque chose de normal ! Il y a une part de chance et une part de faire savoir. A la base, la musique, c’est le live. Si on fait des albums, c’est pour essayer de retranscrire ce qu’on fait en live.
Ressentez-vous un intérêt réel pour le Blues-Rock aujourd’hui en France, ou bien pensez-vous que cette musique est plutôt cantonnée à certains amateurs ?
Amandyn : je pense qu’avec ROSEDALE on arrive à apporter une touche de fraicheur, dans le style Blues/Blues-Rock, qui touche aussi les plus jeunes, ce qui est plus rare avec du Blues standard, car ça n’est pas forcément ce qui va les attirer. On se rend compte que notre public est de tous les âges, et que nous pouvons toucher tout le monde.
Charlie : il y a 3 façons de voir le Blues. Soit se dire qu’on fait du Blues de manière complètement traditionnelle, soit on fait du Blues un peu « modernisé », auquel on apporte une nouvelle touche, soit on considère que ce qu’on fait n’est pas du Blues. Dans tous les cas, ça me va, car ce qu’on fait est sincère, et on ne ressent pas le besoin d’être catégoriser dans un genre particulier, même si clairement les influences qui ressortent le plus, c’est le Blues et le Rock. Il y a des gens de tous âges qui viennent à nos concerts. Malgré tout on sait quand même qu’en France, d’une manière générale, les gens qui vont aux concerts de Blues ont plus de 50 ans en moyenne. Ce qui est inquiétant, c’est de se dire que nous deux on a 30 ans, et quand nous on en aura 50 ou 60, qui viendra aux concerts de Blues ?… C’est vraiment important de trouver une continuité parce que bien souvent les jeunes, ceux qui ne viennent pas aux concerts de Blues, sont un peu effrayés ou répulsés par le mot Blues, alors que, quand ils font l’effort de venir à un concert de Blues et qu’ils découvrent ce style, on entend souvent cette réaction : « c’est ça du Blues ! C’est super ! ». Je pense que c’est un manque de connaissance. Les jeunes se disent que le Blues est une musique de vieux, alors que c’est une musique qui est encore bien vivante et qu’il faut tout faire pour qu’elle le reste. La France est aussi particulière sur ce sujet. En Angleterre, si on demande à un gamin de 15 ans qui est Clapton, il le sait !
Vous tournez beaucoup : comment organisez-vous vos dates ? Avez-vous une team pour vous aider ?
Amandyn : je pense qu’il y a plusieurs éléments. Il y a eu l’effet qu’on a fait avec nos vidéos, après il y a eu du bouche à oreille. Il y a Charlie et Denis qui sont dans le milieu Blues depuis des années. Tout cela génère des liens, des réseaux, des connaissances. C’est un mélange de tout ça. Charlie et moi, au niveau du démarchage on a passé des heures et des heures…
Charlie : depuis peu, on travaille avec une agence de booking dont on rêvait. C’est une agence incroyable. Grâce à celle-ci, nous allons rejouer en Suisse, en Allemagne. Il y aura deux release party en fin d’année : une en France en novembre et une en Allemagne en décembre.
Charlie : peux-tu nous détailler le matériel que tu utilises ?
Je joue principalement sur Cort CR-Custom qui est vraiment une super guitare et j’utilise également une Stratocaster. J’ai une tête signature d’ampli qui est de chez Redplate. Ce sont des amplis fabriqués à Phoenix, Arizona. J’ai également des pédales Thrilltone, que j’utilise sur le prochain album, et qui sont alsaciennes.
Quelles sont tes références en termes de guitaristes ?
Pour moi, s’il n’y avait qu’un guitariste, ce serait Jimmy Page ! Il incarne le Rock n’ Roll et c’est lui qui m’a donné envie de jouer. En matière de compositions, de sons, de production, il a apporté beaucoup et il a changé la face de la musique. Ma première influence, c’est lui et Hendrix. Il y a aussi Gary Moore. Dans les guitaristes actuels, j’adore Joe Bonamassa qui est superbe. D’une manière générale, j’aime particulièrement les guitaristes qui ont quelque chose d’unique. Il y en a beaucoup : Ritchie Blackmore, Clapton…, Jeff Beck : il fait une seule note et on sait que c’est lui ! La Stratocaster existe depuis 70 ans, et il n’y a personne qui a sorti ça avant lui d’une Strat ! Ce que j’aime également avec Joe Bonamassa, c’est qu’il reprend énormément de standards et qu’il en fait redécouvrir beaucoup. D’après moi, il fait partie des gens qui entretiennent la flamme du Blues. J’ai un respect énorme pour cela, que je trouve musicalement intelligent et de bon goût.
Nous avons trouvé un morceau comme « New Frontier » extrêmement puissant et personnel. Allez-vous continuer dans cette voie, entre l’acoustique et l’électrique ?
Charlie : je pense qu’on ne veut pas tomber dans le jeu de l’auto imitation. On a fait ce morceau très naturellement, comme tous les morceaux de l’album. On a écrit les morceaux très rapidement et « New Frontier » est le dernier morceau qui ait été composé. On ne pensait honnêtement pas qu’il y aurait autant de réactions positives de la part des gens. On avait envie de faire un morceau un peu psychédélique, et on s’était dit qu’on pouvait se le permettre sur l’album, même si le reste et un peu plus bluesy. En fait, tout le monde a remarqué ce morceau.
D’une manière générale, je dirais qu’on ne cherche pas expressément spécialement à se renouveler, on ne cherche pas à refaire ce qu’on a fait ou éviter de refaire ce qu’on a déjà fait. On fait !
Amandyn : ça va avec les émotions, les sentiments, les humeurs, les périodes de la vie… C’est vraiment des choses qui nous touchent.
Charlie : bizarrement, même s’il y a peu d’acoustique sur les albums, tout ce qu’on fait, ça se fait beaucoup en acoustique à la maison. On part du principe qu’un bon morceau, déjà ça doit marcher guitare/voix. Pour « New Frontier », on avait une idée de l’ambiance sans avoir les notes exactes de la guitare.
Pouvez-vous nous parler de votre second album ?
Est-il terminé ? Y a-t-il des invités ? Une version vinyle sera t’elle prévue ?
Charlie : la sortie de l’album sera le 9 novembre. Il y aura 2 spécial guests et aucun des deux n’est français. Ils ne se connaissent d’ailleurs pas entre eux.
Il y aura une version vinyle de cet album, grâce à notre coproducteur. On rêvait de faire un vinyle parce que c’est beau, que c’est un bel objet.
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Musiciens : Amandyn Roses (chant), Charlie Fabert (guitare), Phil Sissler (basse), Denis Palatin (batterie), Séraphin Palméri (claviers).