Samantha Fish : chronique album « Kill or be Kind » (2019)
Voici le sixième album de cette jeune (30 ans) musicienne américaine. Je l’ai découverte il y a environ 2 ans à travers les nombreuses vidéos qui circulent sur le net et je me suis précipité sur sa discographie, tant la voix, le jeu de guitare et la prestance scénique de cette artiste m’ont convaincu qu’on avait à faire à une grande !
Autant dire que les 3 premiers albums sont des bombes, bluesy à souhait et rugueux, tout en ménageant des moments calmes, des ballades dont la belle est friande. Les 2 autres sortis en 2017 m’ont un peu moins plus, le premier trop cuivré et dans un style rythm’n blues qui ne convient pas forcément à sa voix, et le second, meilleur, mais pratiquement acoustique avec une tendance très « country ». Cependant la voix était là, toujours belle et les compos et les reprises toujours intéressantes.
Ce sixième opus commence par un morceau très rugueux, basse et « cigar box guitare » très fuzzy (non les HP de vos enceintes ne sont pas morts !). On s’attend à un retour vers les choses basiques et rugueuses des 3 premiers disques… Que nenni !… Les 10 pièces suivantes sont toutes aussi originales les unes que les autres. Le mid tempo est souvent de mise et on a une ambiance cool qui rappelle curieusement les bons moments californiens de The Eagles, bien que Samantha soit du Missouri. Une légèreté dans le ton pour des sujets pourtant graves, enfin un sujet grave : l’amour ! Samantha semble se livrer à une profonde réflexion sur ce curieux phénomène humain… Donc musicalement on a vraiment 11 pépites bien différentes les unes des autres, mais d’une cohérence absolument incroyable. Le disque se laisse déguster au son de la voix et des guitare de la belle, sans qu’on voit le temps passer. L’instrumentation est minimaliste, voire intimiste. Elle a son band de scène (ce que devrait faire d’ailleurs Beth Hart au lieu de prendre des musiciens de studio pas du tout impliqués…) avec une partie rythmique basse /batterie très mise en avant et savoureuse. Des nappes de B3, de Rhodes, de synthés et des cuivres pas assommants du tout et quelques chœurs féminins par ci par là. De la guitare bien sûr, assurée par la dame, avec des soli bien présents, avec beaucoup de slide (bottleneck), mais dont le plus long doit à peine excéder les 30 secondes (elle les réserve pour la scène!). Et quelle créativité ! Ce qui fait la différence, c’est que certains morceaux pourraient paraître formatés au début, mais tous décollent à un moment ou à un autre, soit par le refrain soit par une rupture rythmique, soit par un solo (Dirty »). Cela montre les réels talents de compositrice de Samantha Fish. Des créations vraiment originales comme le langoureux, et quasi acoustique « Dream girl ». Ainsi aussi « Fair weather » dont la progression d’accords très « Lennnonienne » est assez troublante.L’ensemble, comme les paroles, est assez mélancolique, voire sombre. Reste la voix…. Un coup de foudre pour moi j’avoue, qui laisse d’autres bien en arrière.. Non pas qu’elle ait une puissance extraordinaire. Si on se réfère aux ainées je la situe entre Debbie Harris (« Love your lies » semble d’ailleurs tout droit sorti d’un album de Blondie), Susan Tedeschi (sans l’acidité) et Emmylou Harris (sans le tremolo). Mais avec quelque chose d’indéfinissable, incroyablement sexy et touchant, qui fait d’un « oh..oh..oh » un truc qui vous prend aux tripes .
Éclectique donc, mais d’une étonnante homogénéité. Samantha Fish a eu l’intelligence de ne pas se laisser enfermer dans une catégorie « blues rock » astreignante, galvaudée, formatée (d’ailleurs aucun morceau de blues ici). Elle a, à mon avis, réussit l’album parfait, intimiste, multichrome et qui touche l’âme de l’homme. Vraiment, comment dirais-je?…j’en reste pantois d’admiration, en espérant une grande carrière pour cette belle artiste. (20/20).
- Chronique rédigée par Topprog